Nous vivons actuellement une période incertaine en matière de consommation touristique. La crise sanitaire est-elle encore présente dans l’esprit des voyageurs ? Le tourisme reprend-il comme en 2019 ? Ou au contraire les habitudes de consommation touristiques apparues durant ces deux dernières années vont-elles perdurer ? Autant de questions que tous les acteurs du tourisme à travers le monde se posent actuellement.
Mais durant le mois d’octobre 2021, plusieurs acteurs du tourisme en France ont quelque peu tiré la sonnette d’alarme. Concernant les stratégies ou les non-stratégies mises en place dans le tourisme français. A-t-on réellement tiré les leçons de cette crise sanitaire et économique ? Comment va réagir le marché du tourisme ? Mais surtout qu’en est-il de la destination France ?
À travers cette revue de presse, faisons le point sur l’avenir et surtout le présent touristique en France. À quoi devons-nous nous attendre ? Et comment devons-nous agir ?
La France, prochaine destination des voyageurs ?
Été 2021, tourisme de proximité : destination France
Melena Gufflet, directrice générale France de Booking.com pour la France a partagé avec l’Echo Touristique le bilan de l’été en matière de destinations des Français. Dans cette interview intitulée : « Booking : le top 5 des destinations en France pendant l’été ». Le top 5 global des destinations les plus réservées cet été sur la plateforme par les voyageurs français sont : Paris, Marseille, Barcelone, Lyon et Bordeaux. On a donc pu observer un tourisme de proximité de la part des Français. Et autre fait marquant dans la consommation touristique des Français sur le deuxième trimestre 2021 : 32 % des nuitées totales réservées sur la plateforme concernent des locations saisonnières.
Toussaint : destination France, mais pas que…
Mais cet été, nous étions dans une autre phase de sortie de la crise sanitaire. Alors qu’en est-il aujourd’hui ? Tourmag fait le point dans un article intitulé « Vacances de la Toussaint : les locations de vacances ont le vent en poupe ! ». En se basant sur les données de réservations de PAP Vacances, cet article nous apprend que les vacances de la Toussaint ont enregistré un record en matière de réservations en 2021 par rapport à 2019 !
Et particulièrement les réservations de gîtes pour les Français qui enregistrent un taux d’occupation de 41 %. Soit une augmentation de 10 points par rapport à 2019. Les Français continuent donc de réserver en France.
Cependant, dans un second article de Tourmag : « Vacances de la Toussaint : forte croissance des recherches voyages à l’international » le magazine nuance ses propos. Suite à une étude d’Amadeus concernant les recherches de voyages des Français pour la Toussaint. Effectivement, les Français ont massivement réservé des séjours dans des locations saisonnières en France pour la période de la Toussaint. Mais Amadeus observe également une augmentation des recherches de séjours à l’étranger.
Si les Français partent à l’étranger, les étrangers reviennent en France ?
Caroline Leboucher, directrice d’Atout France, confie dans une interview accordée à Tourmag : « Atout France coorganise le Sommet Destination France, en présence d’Emmanuel Macron » que grâce au bon taux de vaccination en France, les voyageurs européens, américains, brésiliens et canadiens reviennent petit à petit. À quel degré la balance est-elle équilibrée ? Pour le moment, aucune étude assez précise n’a été publiée.
Dans son rapport eDreams Odigeo : « A year in Travel 2021 » étudie les données de réservations de vols des agences de voyages en ligne de l’entreprise (eDreams, Opodo, Go Voyages et Travellink). Ce rapport couvre les périodes du 1er janvier au 15 octobre 2021. Les données étudiées se basent sur le comportement des voyageurs provenant des principaux marchés européens (France, Allemagne, Suède, Portugal, Espagne, Italie et Royaume-Uni) et des États-Unis. Ce rapport nous apprend que pour 2022, les Français vont retrouver leurs habitudes précovid puisqu’ils ont déjà majoritairement effectué des réservations pour 2022 vers des destinations lointaines et ensoleillées (telles que la Guadeloupe et la Martinique). Il y a donc fort à parier que le tourisme de proximité sur lequel on a misé ces deux dernières années ne perdure pas autant que prévu.
La bonne nouvelle c’est que la France (et notamment Paris) est en tête du classement global des réservations pour 2022 pour les voyageurs espagnols et portugais. Paris est également la troisième destination la plus recherchée par les Américains pour 2022. Les Français risquent de délaisser un peu la destination France. Cependant les chiffres de ce rapport laissent augurer d’un retour massif de la clientèle étrangère sur le territoire français.
La France va-t-elle conserver sa position de première destination réceptive au monde ?
Il n’est pas sûr que le classement de Lonely Planet des destinations 2022 : « Best of 2022 » réponde exactement à cette question, mais en tout cas il nous en donne un élément de réponse.
Le classement de Lonely Planet répertorie les 10 meilleures destinations pour l’année 2022, les 10 meilleures villes et les 10 meilleures régions. Quand on sait que la France est le premier pays du monde en matière de tourisme réceptif depuis des dizaines d’années, on s’attend tout de même à ce qu’elle figure en bonne position dans ce type de classement. Et pourtant… elle n’apparaît qu’une seule fois. La Bourgogne est citée dans le classement des 10 meilleures régions à la 10e position.
Quelle est la stratégie de la destination France ?
L'avis de Jean Pinard, directeur du CRT Occitanie
Jean Pinard, directeur du Comité Régional Occitanie, dans une interview pour Tourmag : « Occitanie : “Pourquoi vouloir toujours aller chercher des clientèles lointaines ?” » tire la sonnette d’alarme. Il nous éclaire brillamment sur des solutions à envisager pour que la destination France prenne toute la dimension de sa valeur. Dans cette interview, le directeur de CRT déplore le manque d’une marque France. Aujourd’hui, tous les acteurs du tourisme français sont éparpillés autour de 2000 marques entre les OT, les CRT et les ADT. Il n’y a pas de vision stratégique commune, parfois il n’y a même pas de vision stratégique du tout.
Il continue en posant la question de la croissance du tourisme que l’on souhaite. À l’heure où la transition écologique est plus que nécessaire, la question se pose réellement. Devons-nous continuer à chercher des touristes étrangers alors que la crise sanitaire nous a prouvé que le tourisme de proximité en France était possible ?
Durant toute la crise, nous nous sommes intéressés au tourisme d’après et du futur, mais ne devrions-nous pas plutôt nous préoccuper du tourisme du présent ?
Les propositions de l'Alliance France Tourisme pour une nouvelle stratégie touristique
L’Alliance Tourisme France est un cercle de réflexion réunissant certaines des plus grandes entreprises de l’industrie du tourisme français (Accor, Compagnie des Alpes, Voyageurs du Monde, Belambra Clubs, OUI.sncf, Selectour, Pierre & Vacances/Center parcs, Groupe ADP…). Et ils viennent de livrer un document réunissant des propositions pour le déploiement d’une nouvelle stratégie touristique comme nous en informe l’Echo Touristique dans un article intitulé « Les 16 propositions de l’Alliance France Tourisme pour une nouvelle stratégie touristique », ainsi que Tourmag dans son article : « Reconquête du tourisme en France : les propositions de l’Alliance France Tourisme ».
Ces propositions ont été écrites dans l’optique de créer une stratégie qui permettra « à la France de conserver et conforter sa place de destination la plus visitée du monde […] ». Avec ces propositions, l’Alliance souhaite également faire un appel au Plan de reconquête annoncé le 2 juin 2021 par le Président de la République. Mais concrètement que contient ce document ? Ce document contient 16 propositions répondant à 4 axes de développement :
- Ériger le tourisme au rang de priorité nationale et s’armer d’une stratégie française
- Se transformer pour inventer l’industrie touristique française du futur
- Se professionnaliser pour améliorer la qualité de l’offre de service
- S’adapter en simplifiant les normes et les procédures administratives
Pour lire l’intégralité du document, vous pouvez le télécharger en cliquant sur ce lien.
Le Sommet Destination France confidentiel...
Et en parallèle de toutes ces interrogations, nous apprenons au détour d’une interview pour Tourmag (« Atout France coorganise le Sommet Destination France, en présence d’Emmanuel Macron ») par le biais de Caroline Leboucher qu’un Sommet « Destination France » est organisé par Atout France et le World Travel & Tourism Council en présence d’Emmanuel Macron le 4 novembre 2021. Je parle de Sommet « Destination France » confidentiel, car il n’y a aucune communication de fait à ce sujet, hormis 2 articles sur Tourmag. Il n’en est question dans aucun autre journal ou magazine touristique. Il n’en est pas non plus question sur le site de l’Agence France-Presse. Ce manque de communication n’augure rien de bon quant à l’importance de ce Sommet.
Et pourtant c’est toute une filière économique qui attend impatiemment que quelque chose se passe concernant la destination France. D’après les mots de Caroline Leboucher, une quarantaine de CEO français et internationaux du secteur du tourisme seront reçus par le Président de la Républilque. Cependant l’objectif ne semble pas de pousser la réflexion à la stratégie touristique française. Mais plus de se congratuler et de se reposer sur des acquis discutables : la France leader en matière de tourisme à l’international. Mais peut-être que j’interprète. Et que les informations me donneront tort d’ici quelques heures (j’écris cette revue de presse le 3 novembre). Une stratégie touristique française unique, pensée et réfléchie va nous être annoncée ?
Destination France : une destination durable ?
Quand on observe cette désorganisation en matière de stratégie commune, on peut s’interroger sur la capacité des acteurs du tourisme à faire de la France une destination durable. Car on le sait l’enjeu est important, il y a urgence environnementale.
Un déséquilibre entre les régions
Lors d’une table ronde organisée dans le cadre des journées Envie de France, lors de l’IFTM-Top Resa, les participants dont Christian Mantei, président d’Atout France et Pascal Acquaviva, chargé de communication et marketing de l’Agence du tourisme de Corse (ATC) ont abordé le sujet de la pression environnementale pour les destinations françaises. Il ressort de l’article de l’Echo Touristique « Envies de France : “on ne peut plus se contenter de faire du greenwashing” » que les destinations ont bien pris conscience de l’urgence écologique en matière de tourisme en France.
Cependant, quand il est question des solutions apportées et des actions concrètes engagées par les régions, toutes ne sont pas sur un pied d’égalité. La Bourgogne–Franche-Comté par exemple mise sur les tendances et développe le slow tourisme… Par contre la Corse ou les stations de haute montagne en sont encore à observer ce que nos voisins grecs ou italiens entreprennent. Urgence environnementale il y a certes. Mais nos régions misent à priori sur des “choses” qui se mettront en place sur une vingtaine d’années.
Le secteur de la distribution, autoproclamé non-concerné
Mais lors d’une autre table ronde, toujours lors du salon IFTM-Top Resa, Tourmag nous relate les propos tenus par plusieurs directeurs du secteur de la distribution (Marietton, Havas, Cediv) : “Les agences ne veulent pas entendre parler de révolution écologique !”. Les agences de voyages et Tour Operator présents ont ouvertement déclaré privilégier leur reprise économique vitale à une reprise écologique. Or il s’agit là encore d’une vision à court terme. Qui comme Romain Pommier le dit : “aura des effets bien plus néfastes que le coronavirus à moyen et long terme”.
Et pourtant, deux villes françaises dans les destinations les plus durables
Tous les ans, le Global Destination Sustainability Movement publie le “Global Destination Sustainability Index” et celui de 2021 vient de paraître. Ce classement note les performances d’une ville en tant que destination touristique en matière de stratégie et infrastructure environnementale, sa performance en matière de durabilité sociale, le soutien des fournisseurs du secteur, ainsi que la stratégie et les initiatives de gestion durable de la destination. Et cet index montre qu’en 2021, de plus en plus de villes se sont portées candidates pour être benchamarkées par rapport à 2019. Ce qui est une excellente nouvelle.
Et dans ce classement, nous retrouvons cette année deux villes françaises : Lyon et Bordeaux. Respectivement à la 7e et 9e position. Au vu de la politique touristique française actuelle, ce n’est déjà pas si mal, non ?
Conclusion
Vous l’aurez compris : en tant que propriétaire d’un hébergement touristique indépendant ; et qu’on ait tendance à l’oublier ou non : acteur du tourisme français au même titre que d’autres, il ne faudra pas attendre de l’aide ou des directives de plus haut. À vous de dessiner le tourisme tel que vous l’envisager, le rêver et le vivez à ce jour. Basez-vous sur votre bon sens, vos valeurs. Et informez-vous sur le secteur pour vous guider dans vos prises de décisions stratégiques.
Si vous avez besoin que votre destination soit plus mise en avant auprès d’une clientèle en particulier et bien, faites-le. À votre échelle, cela peut paraître pharaonique, mais figurez-vous que vous en avez les moyens. Vous êtes bien plus agile que nos institutions. Avec du courage, de la volonté et certaines connaissances, vous y arriverez.
Et si vous souhaitez que je vous accompagne dans ce type d’actions stratégiques, n’hésitez pas à me contacter. Ensemble, nous discuterons de votre projet et prendrons le temps d’envisager l’avenir.